Partie 1/5

« Ça s’est passé deux fois. C’était l’oncle de mon meilleur ami d’enfance. Je me souviens que j’avais pas encore l’école et j’ai commencé l’école quand j’avais 5 ans. Du coup il me semble que c’était l’année où j’ai commencé. Il m’a dit « viens sur mes genoux, on va faire galope-galope ». On a fait galope-galope et puis il m’a embrassée. Là je me dis non ! Je me suis décalée en mode « qu’est-ce que tu fous wesh ! ». Du coup je suis allée sur un autre canapé.

Et la deuxième fois c’était le soir. Je dormais avec ma mère. Il m’a réveillée. J’ai essayé de secouer un peu ma mère mais… elle a un sommeil hyper lourd… du coup elle s’est pas réveillée. Et il y a eu ce qu’il y a eu. C’est incroyable parce que c’est dans des moments où on est un peu en mode paralysée qu’on fait attention à beaucoup de détails. Je me souviens que ce jour-là c’était clairement la pleine lune et puis j’étais en mode « ah ouais elle est belle la lune ». C’est… comment dire… essayer de s’évader un peu. Et du coup il a fait… il m’a touchée partout. Ensuite il m’a remise au lit et il est allé dans sa chambre.

Le lendemain je suis allée chez mon père et je lui en ai parlé. Bon mon père il était plus pour lui casser la gueule et tout ! C’est ma tante qui lui a dit : « non on va tout de suite au poste de police et ils vont faire le nécessaire ». Et ça a été rapidement pris en charge et tout. On a essayé de me faire voir des psychologues mais je disais rien. J’étais hyper méfiante. Et en plus on m’envoie à une inconnue pour que je lui parle de ce qui s’est passé. Vous vous foutez de moi ?

Moi je comprends tout à fait les enfants qui veulent pas parler de suite. Encore moins à une psychologue. C’est à dire qu’elle fait son travail et tout, mais disons qu’on nous envoie à une inconnue. Même si on nous dit qu’elle est gentille… on est un peu en mode : « je me retrouve toute seule avec cette personne ». Même si c’était une femme ça passait pas. Après quand j’ai voulu vraiment consulter je me suis dit « il est temps d’en parler » puis voilà. J’ai préféré aller en parler par moi-même. »

(Saint-Jean)

Partie 2/5

« Il a été jugé des années après parce qu’on dit que les pédophiles normalement c’est un truc qu’ils font depuis qu’ils sont ados. Du coup le fait que cet homme avait la trentaine et que moi je sois la première c’était un peu « c’est pas qu’on n’a pas envie de croire une gamine mais… » J’étais hyper méfiante. Au moment où il y avait le tribunal j’étais derrière une vitre. Il y a eu tout le blabla, je ne comprenais rien du tout ! Je me disais : mais pourquoi il est pas simplement en prison, allez go quoi !

En fait, ce qui m’a vraiment fait flipper c’est au moment où on m’a demandé si c’était bien cette personne. Ils l’ont fait se retourner, et malgré qu’il voyait seulement son reflet il savait très bien que j’étais derrière. Il a lancé un de ces regards de haine… Putain si le mec il va pas en taule il va vouloir me tuer et tout. J’étais flippée.

Il a été en prison… 3 ans. Je vois pas mal de trucs où y’a des personnes qui font rien de vraiment grave et ils en ont pour 5 ans. Et je me dis qu’il a en partie détruit mon innocence. Je savais même pas ce que c’était faire l’amour ou des trucs comme ça et puis là on m’a balancé « tiens dans la gueule ! ». C’était vraiment ça qui m’a mis la haine envers le monde, la loi, tout ça. Parce que pour moi c’est injuste, mais au niveau de la loi c’est juste.

Il est vite sorti. Je l’ai croisé quand j’avais 16 ans. J’étais dans ma phase rebelle où je voulais casser la gueule à tout le monde qui me faisait chier. Je l’ai vu et sur le moment j’avais une haine intérieure. Bizarrement il m’a vue et il m’a regardée, et il s’est cassé en courant. Du coup j’étais en mode « bon finalement la loi à fait son travail, ou bien la prison ! » Ça m’arrive de temps à autre de le croiser et je le regarde vraiment d’un air « je vais te défoncer un jour ! ». Mais maintenant il a quitté la Suisse, c’est déjà un bon truc.

J’ai envie de dire qu’on a tous des vécus assez différents. Comme dirait ma grand-mère « chacun a sa croix à porter ». Mais peut être que si cela ne m’était pas arrivé je serais pas la personne que je suis maintenant. Qui sait, peut être que je serais une pimbêche hyper narcissique qui n’a aucun respect envers les gens. »

(Saint-Jean)

Partie 3/5

« Quand j’étais petite je ne parlais pas. Pas du tout. Je disais seulement papa, maman, et je montrais ce que je voulais. Je faisais du mutisme sélectif. C’était un peu au moment où je commençais gentiment à m’ouvrir aux personnes qu’il y a eu ce qu’il y a eu. Je me suis complètement renfermée et j’ai repris la parole à l’âge de 10 ans. Bah en fait j’étais un peu… dans South Park y’a le petit bonhomme qui parle jamais, je sais plus comment il s’appelle… celui avec la capuche ! Il parle pas mais il fait les conneries avec eux. J’étais comme ça en fait. Je parlais pas mais je faisais les conneries !

Je riais et tout, et dès que quelqu’un se sentait triste je le réconfortais mais c’était vraiment au niveau des gestes que je communiquais. Si y’a quelqu’un qui allait pas j’allais vers elle et je lui tapotais le dos. Sinon parler c’était pas mon truc. Je kiffais pas faire des phrases, je trouvais ça inutile. Des fois je disais des trucs, bien évidemment, mais c’était vraiment que j’étais obligée de faire une phrase. C’était plutôt : « oui », « non » et « je sais pas ». Si je pouvais éviter de parler j’évitais.

Disons que j’ai des amis extrêmement extravertis et vraiment avec eux je me sentais moi-même. Je les voyais comme ça et je me suis dit : « ça a l’air ouf d’être comme ça en fait ! » Du coup petit à petit j’ai commencé à dire les choses. Dès qu’un truc me plaisait je le disais, dès qu’un truc me plaisait pas je le disais. Mais c’est un travail que j’ai fait petit à petit. J’ai pas changé d’un coup en me disant « ouais demain je serai comme ça, allez ! » Ça a commencé par des bonjours, des trucs comme ça. C’est venu comme ça, petit à petit. »

(Saint-Jean)

Partie 4/5

Malheureusement je suis tombée sur une belle-mère qui était hyper stricte. Dès que je commençais vraiment à m’ouvrir c’était « non tu fais pas la folle, une femme ça doit être comme ça ». J’avais pas le droit d’être moi-même chez moi. Je devais être calme, posée, une femme parfaite selon elle. C’est à dire qui rigole pas trop fort, qui parle pas avec toutes personnes qu’elle rencontre. Après l’école tu rentres à la maison et tu fais à manger, comme une femme. Je faisais tout ça alors que sa fille allait en boite et elle était plus jeune que moi. Je me posais la question si c’était parce que j’étais une personne assez difficile, et que si elle n’était pas comme ça avec moi je ferais plein de bêtises.

Ce qui m’a vraiment fait tilt c’est au moment où elle m’a dit que j’étais une moins que rien, que je faisais rien à la maison, des trucs comme ça. À ce moment là je me suis dit : « non c’est pas vrai, je fais tes trucs avec toi, je fais à manger, je fais le linge, tu peux pas me dire que je ne sers à rien. Bon bah si je sers à rien à quoi ça sert que je sois ici. » Du coup le soir même j’ai préparé mes affaires, mon sac, j’ai mis tous les documents qui étaient hyper importants parce que j’avais peur qu’elle jette tout, et je suis partie le lendemain matin. Je suis allée me réfugier chez mon copain.

Durant toute la journée j’étais en stress parce qu’elle est assez volcanique ma belle-mère. Et moi je voulais vraiment éviter tout ce qui était conflit. C’est à ce moment là aussi que je me suis rendu compte que j’étais vraiment fatiguée. Psychologiquement j’étais vraiment K.O., physiquement aussi. J’avais laissé une petite lettre en mettant la faute sur moi en fait ! C’est ça le truc ! Je disais que j’étais un problème financièrement, que le mieux c’était que je parte pour que financièrement ils puissent mieux s’en sortir. Alors qu’en fait je ne dépensais rien. Tous mes vêtements c’était les vêtements de ma demi-sœur et de ma belle-mère parce que ça me saoulait de faire du shopping, du coup ça m’allait très bien les secondes-mains. Mais j’ai préféré écrire un petit mot en disant que c’était ma faute. »

(Saint-Jean)

Partie 5/5

« Le point qui a vraiment changé ma vie c’est quand mon père et ma belle-mère se sont séparés, du coup je suis partie de là-bas. C’est à ce moment là que je me suis vraiment remise en question, mais tout. Je me suis rendu compte que je faisais tout pour eux et qu’il y avait aucun truc que je faisais pour moi. Je ne savais pas si les émotions que je ressentais envers les gens étaient sincères ou pas. J’avais l’impression d’être une coquille vide. Je voyais que dès qu’une personne m’aimait, je devais aimer d’office. Ce genre de trucs.

Du coup je me suis aussi posé la question si j’aimais réellement mon copain. J’ai rompu avec lui. Durant un mois je l’ai laissé de côté. Il a encore été patient. Je l’ai recontacté, on s’est reparlé, on s’est tout dit, tout ce qui allait, tout ce qui allait pas. Et puis, pour finir, je me suis rendu compte que vraiment mes sentiments étaient sincères ! On est à peu près reparti de zéro. Et en fait maintenant tout va pour le mieux ! Mon copain c’est vraiment… comment dire… c’est la meilleure chose qui me soit arrivée ! J’ai jamais vu un garçon aussi patient. Surtout que je l’ai friendzoné durant 3 ans ! Et petit à petit je me suis dit « en fait je pense que je l’aime ce mec ! ».

Là maintenant je sais vraiment quelle personnalité j’ai, ce que j’aime, ce que j’aime pas. Déjà au niveau de l’avenir je sais ce que je veux faire vraiment, alors qu’avant j’étais hyper indécise, toujours à la recherche de la perfection. En fait maintenant j’en ai rien à faire. Si je réussis tant mieux. Si je réussis pas, on recommence. Mais ouais maintenant je profite à fond de la vie ! J’ai plus de tabou maintenant. S’il faut dire les choses, je les dis et puis voilà ! J’essaie de faire en sorte…je sais pas comment dire. Les personnes trouvent que…pour eux chaque traumatisme ne doit pas être partagé ou quoi que ce soit, alors que moi je suis plutôt du sens que si y’a quelque chose qui va pas il faut le dire. Pourquoi le cacher, le refouler ? »

(Saint Jean)

Partie 1/5

« Ça s’est passé deux fois. C’était l’oncle de mon meilleur ami d’enfance. Je me souviens que j’avais pas encore l’école et j’ai commencé l’école quand j’avais 5 ans. Du coup il me semble que c’était l’année où j’ai commencé. Il m’a dit « viens sur mes genoux, on va faire galope-galope ». On a fait galope-galope et puis il m’a embrassée. Là je me dis non ! Je me suis décalée en mode « qu’est-ce que tu fous wesh ! ». Du coup je suis allée sur un autre canapé.

Et la deuxième fois c’était le soir. Je dormais avec ma mère. Il m’a réveillée. J’ai essayé de secouer un peu ma mère mais… elle a un sommeil hyper lourd… du coup elle s’est pas réveillée. Et il y a eu ce qu’il y a eu. C’est incroyable parce que c’est dans des moments où on est un peu en mode paralysée qu’on fait attention à beaucoup de détails. Je me souviens que ce jour-là c’était clairement la pleine lune et puis j’étais en mode « ah ouais elle est belle la lune ». C’est… comment dire… essayer de s’évader un peu. Et du coup il a fait… il m’a touchée partout. Ensuite il m’a remise au lit et il est allé dans sa chambre.

Le lendemain je suis allée chez mon père et je lui en ai parlé. Bon mon père il était plus pour lui casser la gueule et tout ! C’est ma tante qui lui a dit : « non on va tout de suite au poste de police et ils vont faire le nécessaire ». Et ça a été rapidement pris en charge et tout. On a essayé de me faire voir des psychologues mais je disais rien. J’étais hyper méfiante. Et en plus on m’envoie à une inconnue pour que je lui parle de ce qui s’est passé. Vous vous foutez de moi ?

Moi je comprends tout à fait les enfants qui veulent pas parler de suite. Encore moins à une psychologue. C’est à dire qu’elle fait son travail et tout, mais disons qu’on nous envoie à une inconnue. Même si on nous dit qu’elle est gentille… on est un peu en mode : « je me retrouve toute seule avec cette personne ». Même si c’était une femme ça passait pas. Après quand j’ai voulu vraiment consulter je me suis dit « il est temps d’en parler » puis voilà. J’ai préféré aller en parler par moi-même. »

(Saint-Jean)

Partie 2/5

« Il a été jugé des années après parce qu’on dit que les pédophiles normalement c’est un truc qu’ils font depuis qu’ils sont ados. Du coup le fait que cet homme avait la trentaine et que moi je sois la première c’était un peu « c’est pas qu’on n’a pas envie de croire une gamine mais… » J’étais hyper méfiante. Au moment où il y avait le tribunal j’étais derrière une vitre. Il y a eu tout le blabla, je ne comprenais rien du tout ! Je me disais : mais pourquoi il est pas simplement en prison, allez go quoi !

En fait, ce qui m’a vraiment fait flipper c’est au moment où on m’a demandé si c’était bien cette personne. Ils l’ont fait se retourner, et malgré qu’il voyait seulement son reflet il savait très bien que j’étais derrière. Il a lancé un de ces regards de haine… Putain si le mec il va pas en taule il va vouloir me tuer et tout. J’étais flippée.

Il a été en prison… 3 ans. Je vois pas mal de trucs où y’a des personnes qui font rien de vraiment grave et ils en ont pour 5 ans. Et je me dis qu’il a en partie détruit mon innocence. Je savais même pas ce que c’était faire l’amour ou des trucs comme ça et puis là on m’a balancé « tiens dans la gueule ! ». C’était vraiment ça qui m’a mis la haine envers le monde, la loi, tout ça. Parce que pour moi c’est injuste, mais au niveau de la loi c’est juste.

Il est vite sorti. Je l’ai croisé quand j’avais 16 ans. J’étais dans ma phase rebelle où je voulais casser la gueule à tout le monde qui me faisait chier. Je l’ai vu et sur le moment j’avais une haine intérieure. Bizarrement il m’a vue et il m’a regardée, et il s’est cassé en courant. Du coup j’étais en mode « bon finalement la loi à fait son travail, ou bien la prison ! » Ça m’arrive de temps à autre de le croiser et je le regarde vraiment d’un air « je vais te défoncer un jour ! ». Mais maintenant il a quitté la Suisse, c’est déjà un bon truc.

J’ai envie de dire qu’on a tous des vécus assez différents. Comme dirait ma grand-mère « chacun a sa croix à porter ». Mais peut être que si cela ne m’était pas arrivé je serais pas la personne que je suis maintenant. Qui sait, peut être que je serais une pimbêche hyper narcissique qui n’a aucun respect envers les gens. »

(Saint-Jean)

Partie 3/5

« Quand j’étais petite je ne parlais pas. Pas du tout. Je disais seulement papa, maman, et je montrais ce que je voulais. Je faisais du mutisme sélectif. C’était un peu au moment où je commençais gentiment à m’ouvrir aux personnes qu’il y a eu ce qu’il y a eu. Je me suis complètement renfermée et j’ai repris la parole à l’âge de 10 ans. Bah en fait j’étais un peu… dans South Park y’a le petit bonhomme qui parle jamais, je sais plus comment il s’appelle… celui avec la capuche ! Il parle pas mais il fait les conneries avec eux. J’étais comme ça en fait. Je parlais pas mais je faisais les conneries !

Je riais et tout, et dès que quelqu’un se sentait triste je le réconfortais mais c’était vraiment au niveau des gestes que je communiquais. Si y’a quelqu’un qui allait pas j’allais vers elle et je lui tapotais le dos. Sinon parler c’était pas mon truc. Je kiffais pas faire des phrases, je trouvais ça inutile. Des fois je disais des trucs, bien évidemment, mais c’était vraiment que j’étais obligée de faire une phrase. C’était plutôt : « oui », « non » et « je sais pas ». Si je pouvais éviter de parler j’évitais.

Disons que j’ai des amis extrêmement extravertis et vraiment avec eux je me sentais moi-même. Je les voyais comme ça et je me suis dit : « ça a l’air ouf d’être comme ça en fait ! » Du coup petit à petit j’ai commencé à dire les choses. Dès qu’un truc me plaisait je le disais, dès qu’un truc me plaisait pas je le disais. Mais c’est un travail que j’ai fait petit à petit. J’ai pas changé d’un coup en me disant « ouais demain je serai comme ça, allez ! » Ça a commencé par des bonjours, des trucs comme ça. C’est venu comme ça, petit à petit. »

(Saint-Jean)

Partie 4/5

Malheureusement je suis tombée sur une belle-mère qui était hyper stricte. Dès que je commençais vraiment à m’ouvrir c’était « non tu fais pas la folle, une femme ça doit être comme ça ». J’avais pas le droit d’être moi-même chez moi. Je devais être calme, posée, une femme parfaite selon elle. C’est à dire qui rigole pas trop fort, qui parle pas avec toutes personnes qu’elle rencontre. Après l’école tu rentres à la maison et tu fais à manger, comme une femme. Je faisais tout ça alors que sa fille allait en boite et elle était plus jeune que moi. Je me posais la question si c’était parce que j’étais une personne assez difficile, et que si elle n’était pas comme ça avec moi je ferais plein de bêtises.

Ce qui m’a vraiment fait tilt c’est au moment où elle m’a dit que j’étais une moins que rien, que je faisais rien à la maison, des trucs comme ça. À ce moment là je me suis dit : « non c’est pas vrai, je fais tes trucs avec toi, je fais à manger, je fais le linge, tu peux pas me dire que je ne sers à rien. Bon bah si je sers à rien à quoi ça sert que je sois ici. » Du coup le soir même j’ai préparé mes affaires, mon sac, j’ai mis tous les documents qui étaient hyper importants parce que j’avais peur qu’elle jette tout, et je suis partie le lendemain matin. Je suis allée me réfugier chez mon copain.

Durant toute la journée j’étais en stress parce qu’elle est assez volcanique ma belle-mère. Et moi je voulais vraiment éviter tout ce qui était conflit. C’est à ce moment là aussi que je me suis rendu compte que j’étais vraiment fatiguée. Psychologiquement j’étais vraiment K.O., physiquement aussi. J’avais laissé une petite lettre en mettant la faute sur moi en fait ! C’est ça le truc ! Je disais que j’étais un problème financièrement, que le mieux c’était que je parte pour que financièrement ils puissent mieux s’en sortir. Alors qu’en fait je ne dépensais rien. Tous mes vêtements c’était les vêtements de ma demi-sœur et de ma belle-mère parce que ça me saoulait de faire du shopping, du coup ça m’allait très bien les secondes-mains. Mais j’ai préféré écrire un petit mot en disant que c’était ma faute. »

(Saint-Jean)

Partie 5/5

« Le point qui a vraiment changé ma vie c’est quand mon père et ma belle-mère se sont séparés, du coup je suis partie de là-bas. C’est à ce moment là que je me suis vraiment remise en question, mais tout. Je me suis rendu compte que je faisais tout pour eux et qu’il y avait aucun truc que je faisais pour moi. Je ne savais pas si les émotions que je ressentais envers les gens étaient sincères ou pas. J’avais l’impression d’être une coquille vide. Je voyais que dès qu’une personne m’aimait, je devais aimer d’office. Ce genre de trucs.

Du coup je me suis aussi posé la question si j’aimais réellement mon copain. J’ai rompu avec lui. Durant un mois je l’ai laissé de côté. Il a encore été patient. Je l’ai recontacté, on s’est reparlé, on s’est tout dit, tout ce qui allait, tout ce qui allait pas. Et puis, pour finir, je me suis rendu compte que vraiment mes sentiments étaient sincères ! On est à peu près reparti de zéro. Et en fait maintenant tout va pour le mieux ! Mon copain c’est vraiment… comment dire… c’est la meilleure chose qui me soit arrivée ! J’ai jamais vu un garçon aussi patient. Surtout que je l’ai friendzoné durant 3 ans ! Et petit à petit je me suis dit « en fait je pense que je l’aime ce mec ! ».

Là maintenant je sais vraiment quelle personnalité j’ai, ce que j’aime, ce que j’aime pas. Déjà au niveau de l’avenir je sais ce que je veux faire vraiment, alors qu’avant j’étais hyper indécise, toujours à la recherche de la perfection. En fait maintenant j’en ai rien à faire. Si je réussis tant mieux. Si je réussis pas, on recommence. Mais ouais maintenant je profite à fond de la vie ! J’ai plus de tabou maintenant. S’il faut dire les choses, je les dis et puis voilà ! J’essaie de faire en sorte…je sais pas comment dire. Les personnes trouvent que…pour eux chaque traumatisme ne doit pas être partagé ou quoi que ce soit, alors que moi je suis plutôt du sens que si y’a quelque chose qui va pas il faut le dire. Pourquoi le cacher, le refouler ? »

(Saint Jean)

Publié le: 6 octobre 2020

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Partie 1/5

« Ça s’est passé deux fois. C’était l’oncle de mon meilleur ami d’enfance. Je me souviens que j’avais pas encore l’école et j’ai commencé l’école quand j’avais 5 ans. Du coup il me semble que c’était l’année où j’ai commencé. Il m’a dit « viens sur mes genoux, on va faire galope-galope ». On a fait galope-galope et puis il m’a embrassée. Là je me dis non ! Je me suis décalée en mode « qu’est-ce que tu fous wesh ! ». Du coup je suis allée sur un autre canapé.

Et la deuxième fois c’était le soir. Je dormais avec ma mère. Il m’a réveillée. J’ai essayé de secouer un peu ma mère mais… elle a un sommeil hyper lourd… du coup elle s’est pas réveillée. Et il y a eu ce qu’il y a eu. C’est incroyable parce que c’est dans des moments où on est un peu en mode paralysée qu’on fait attention à beaucoup de détails. Je me souviens que ce jour-là c’était clairement la pleine lune et puis j’étais en mode « ah ouais elle est belle la lune ». C’est… comment dire… essayer de s’évader un peu. Et du coup il a fait… il m’a touchée partout. Ensuite il m’a remise au lit et il est allé dans sa chambre.

Le lendemain je suis allée chez mon père et je lui en ai parlé. Bon mon père il était plus pour lui casser la gueule et tout ! C’est ma tante qui lui a dit : « non on va tout de suite au poste de police et ils vont faire le nécessaire ». Et ça a été rapidement pris en charge et tout. On a essayé de me faire voir des psychologues mais je disais rien. J’étais hyper méfiante. Et en plus on m’envoie à une inconnue pour que je lui parle de ce qui s’est passé. Vous vous foutez de moi ?

Moi je comprends tout à fait les enfants qui veulent pas parler de suite. Encore moins à une psychologue. C’est à dire qu’elle fait son travail et tout, mais disons qu’on nous envoie à une inconnue. Même si on nous dit qu’elle est gentille… on est un peu en mode : « je me retrouve toute seule avec cette personne ». Même si c’était une femme ça passait pas. Après quand j’ai voulu vraiment consulter je me suis dit « il est temps d’en parler » puis voilà. J’ai préféré aller en parler par moi-même. »

(Saint-Jean)

Partie 2/5

« Il a été jugé des années après parce qu’on dit que les pédophiles normalement c’est un truc qu’ils font depuis qu’ils sont ados. Du coup le fait que cet homme avait la trentaine et que moi je sois la première c’était un peu « c’est pas qu’on n’a pas envie de croire une gamine mais… » J’étais hyper méfiante. Au moment où il y avait le tribunal j’étais derrière une vitre. Il y a eu tout le blabla, je ne comprenais rien du tout ! Je me disais : mais pourquoi il est pas simplement en prison, allez go quoi !

En fait, ce qui m’a vraiment fait flipper c’est au moment où on m’a demandé si c’était bien cette personne. Ils l’ont fait se retourner, et malgré qu’il voyait seulement son reflet il savait très bien que j’étais derrière. Il a lancé un de ces regards de haine… Putain si le mec il va pas en taule il va vouloir me tuer et tout. J’étais flippée.

Il a été en prison… 3 ans. Je vois pas mal de trucs où y’a des personnes qui font rien de vraiment grave et ils en ont pour 5 ans. Et je me dis qu’il a en partie détruit mon innocence. Je savais même pas ce que c’était faire l’amour ou des trucs comme ça et puis là on m’a balancé « tiens dans la gueule ! ». C’était vraiment ça qui m’a mis la haine envers le monde, la loi, tout ça. Parce que pour moi c’est injuste, mais au niveau de la loi c’est juste.

Il est vite sorti. Je l’ai croisé quand j’avais 16 ans. J’étais dans ma phase rebelle où je voulais casser la gueule à tout le monde qui me faisait chier. Je l’ai vu et sur le moment j’avais une haine intérieure. Bizarrement il m’a vue et il m’a regardée, et il s’est cassé en courant. Du coup j’étais en mode « bon finalement la loi à fait son travail, ou bien la prison ! » Ça m’arrive de temps à autre de le croiser et je le regarde vraiment d’un air « je vais te défoncer un jour ! ». Mais maintenant il a quitté la Suisse, c’est déjà un bon truc.

J’ai envie de dire qu’on a tous des vécus assez différents. Comme dirait ma grand-mère « chacun a sa croix à porter ». Mais peut être que si cela ne m’était pas arrivé je serais pas la personne que je suis maintenant. Qui sait, peut être que je serais une pimbêche hyper narcissique qui n’a aucun respect envers les gens. »

(Saint-Jean)

Partie 3/5

« Quand j’étais petite je ne parlais pas. Pas du tout. Je disais seulement papa, maman, et je montrais ce que je voulais. Je faisais du mutisme sélectif. C’était un peu au moment où je commençais gentiment à m’ouvrir aux personnes qu’il y a eu ce qu’il y a eu. Je me suis complètement renfermée et j’ai repris la parole à l’âge de 10 ans. Bah en fait j’étais un peu… dans South Park y’a le petit bonhomme qui parle jamais, je sais plus comment il s’appelle… celui avec la capuche ! Il parle pas mais il fait les conneries avec eux. J’étais comme ça en fait. Je parlais pas mais je faisais les conneries !

Je riais et tout, et dès que quelqu’un se sentait triste je le réconfortais mais c’était vraiment au niveau des gestes que je communiquais. Si y’a quelqu’un qui allait pas j’allais vers elle et je lui tapotais le dos. Sinon parler c’était pas mon truc. Je kiffais pas faire des phrases, je trouvais ça inutile. Des fois je disais des trucs, bien évidemment, mais c’était vraiment que j’étais obligée de faire une phrase. C’était plutôt : « oui », « non » et « je sais pas ». Si je pouvais éviter de parler j’évitais.

Disons que j’ai des amis extrêmement extravertis et vraiment avec eux je me sentais moi-même. Je les voyais comme ça et je me suis dit : « ça a l’air ouf d’être comme ça en fait ! » Du coup petit à petit j’ai commencé à dire les choses. Dès qu’un truc me plaisait je le disais, dès qu’un truc me plaisait pas je le disais. Mais c’est un travail que j’ai fait petit à petit. J’ai pas changé d’un coup en me disant « ouais demain je serai comme ça, allez ! » Ça a commencé par des bonjours, des trucs comme ça. C’est venu comme ça, petit à petit. »

(Saint-Jean)

Partie 4/5

Malheureusement je suis tombée sur une belle-mère qui était hyper stricte. Dès que je commençais vraiment à m’ouvrir c’était « non tu fais pas la folle, une femme ça doit être comme ça ». J’avais pas le droit d’être moi-même chez moi. Je devais être calme, posée, une femme parfaite selon elle. C’est à dire qui rigole pas trop fort, qui parle pas avec toutes personnes qu’elle rencontre. Après l’école tu rentres à la maison et tu fais à manger, comme une femme. Je faisais tout ça alors que sa fille allait en boite et elle était plus jeune que moi. Je me posais la question si c’était parce que j’étais une personne assez difficile, et que si elle n’était pas comme ça avec moi je ferais plein de bêtises.

Ce qui m’a vraiment fait tilt c’est au moment où elle m’a dit que j’étais une moins que rien, que je faisais rien à la maison, des trucs comme ça. À ce moment là je me suis dit : « non c’est pas vrai, je fais tes trucs avec toi, je fais à manger, je fais le linge, tu peux pas me dire que je ne sers à rien. Bon bah si je sers à rien à quoi ça sert que je sois ici. » Du coup le soir même j’ai préparé mes affaires, mon sac, j’ai mis tous les documents qui étaient hyper importants parce que j’avais peur qu’elle jette tout, et je suis partie le lendemain matin. Je suis allée me réfugier chez mon copain.

Durant toute la journée j’étais en stress parce qu’elle est assez volcanique ma belle-mère. Et moi je voulais vraiment éviter tout ce qui était conflit. C’est à ce moment là aussi que je me suis rendu compte que j’étais vraiment fatiguée. Psychologiquement j’étais vraiment K.O., physiquement aussi. J’avais laissé une petite lettre en mettant la faute sur moi en fait ! C’est ça le truc ! Je disais que j’étais un problème financièrement, que le mieux c’était que je parte pour que financièrement ils puissent mieux s’en sortir. Alors qu’en fait je ne dépensais rien. Tous mes vêtements c’était les vêtements de ma demi-sœur et de ma belle-mère parce que ça me saoulait de faire du shopping, du coup ça m’allait très bien les secondes-mains. Mais j’ai préféré écrire un petit mot en disant que c’était ma faute. »

(Saint-Jean)

Partie 5/5

« Le point qui a vraiment changé ma vie c’est quand mon père et ma belle-mère se sont séparés, du coup je suis partie de là-bas. C’est à ce moment là que je me suis vraiment remise en question, mais tout. Je me suis rendu compte que je faisais tout pour eux et qu’il y avait aucun truc que je faisais pour moi. Je ne savais pas si les émotions que je ressentais envers les gens étaient sincères ou pas. J’avais l’impression d’être une coquille vide. Je voyais que dès qu’une personne m’aimait, je devais aimer d’office. Ce genre de trucs.

Du coup je me suis aussi posé la question si j’aimais réellement mon copain. J’ai rompu avec lui. Durant un mois je l’ai laissé de côté. Il a encore été patient. Je l’ai recontacté, on s’est reparlé, on s’est tout dit, tout ce qui allait, tout ce qui allait pas. Et puis, pour finir, je me suis rendu compte que vraiment mes sentiments étaient sincères ! On est à peu près reparti de zéro. Et en fait maintenant tout va pour le mieux ! Mon copain c’est vraiment… comment dire… c’est la meilleure chose qui me soit arrivée ! J’ai jamais vu un garçon aussi patient. Surtout que je l’ai friendzoné durant 3 ans ! Et petit à petit je me suis dit « en fait je pense que je l’aime ce mec ! ».

Là maintenant je sais vraiment quelle personnalité j’ai, ce que j’aime, ce que j’aime pas. Déjà au niveau de l’avenir je sais ce que je veux faire vraiment, alors qu’avant j’étais hyper indécise, toujours à la recherche de la perfection. En fait maintenant j’en ai rien à faire. Si je réussis tant mieux. Si je réussis pas, on recommence. Mais ouais maintenant je profite à fond de la vie ! J’ai plus de tabou maintenant. S’il faut dire les choses, je les dis et puis voilà ! J’essaie de faire en sorte…je sais pas comment dire. Les personnes trouvent que…pour eux chaque traumatisme ne doit pas être partagé ou quoi que ce soit, alors que moi je suis plutôt du sens que si y’a quelque chose qui va pas il faut le dire. Pourquoi le cacher, le refouler ? »

(Saint Jean)

Partie 1/5

« Ça s’est passé deux fois. C’était l’oncle de mon meilleur ami d’enfance. Je me souviens que j’avais pas encore l’école et j’ai commencé l’école quand j’avais 5 ans. Du coup il me semble que c’était l’année où j’ai commencé. Il m’a dit « viens sur mes genoux, on va faire galope-galope ». On a fait galope-galope et puis il m’a embrassée. Là je me dis non ! Je me suis décalée en mode « qu’est-ce que tu fous wesh ! ». Du coup je suis allée sur un autre canapé.

Et la deuxième fois c’était le soir. Je dormais avec ma mère. Il m’a réveillée. J’ai essayé de secouer un peu ma mère mais… elle a un sommeil hyper lourd… du coup elle s’est pas réveillée. Et il y a eu ce qu’il y a eu. C’est incroyable parce que c’est dans des moments où on est un peu en mode paralysée qu’on fait attention à beaucoup de détails. Je me souviens que ce jour-là c’était clairement la pleine lune et puis j’étais en mode « ah ouais elle est belle la lune ». C’est… comment dire… essayer de s’évader un peu. Et du coup il a fait… il m’a touchée partout. Ensuite il m’a remise au lit et il est allé dans sa chambre.

Le lendemain je suis allée chez mon père et je lui en ai parlé. Bon mon père il était plus pour lui casser la gueule et tout ! C’est ma tante qui lui a dit : « non on va tout de suite au poste de police et ils vont faire le nécessaire ». Et ça a été rapidement pris en charge et tout. On a essayé de me faire voir des psychologues mais je disais rien. J’étais hyper méfiante. Et en plus on m’envoie à une inconnue pour que je lui parle de ce qui s’est passé. Vous vous foutez de moi ?

Moi je comprends tout à fait les enfants qui veulent pas parler de suite. Encore moins à une psychologue. C’est à dire qu’elle fait son travail et tout, mais disons qu’on nous envoie à une inconnue. Même si on nous dit qu’elle est gentille… on est un peu en mode : « je me retrouve toute seule avec cette personne ». Même si c’était une femme ça passait pas. Après quand j’ai voulu vraiment consulter je me suis dit « il est temps d’en parler » puis voilà. J’ai préféré aller en parler par moi-même. »

(Saint-Jean)

Partie 2/5

« Il a été jugé des années après parce qu’on dit que les pédophiles normalement c’est un truc qu’ils font depuis qu’ils sont ados. Du coup le fait que cet homme avait la trentaine et que moi je sois la première c’était un peu « c’est pas qu’on n’a pas envie de croire une gamine mais… » J’étais hyper méfiante. Au moment où il y avait le tribunal j’étais derrière une vitre. Il y a eu tout le blabla, je ne comprenais rien du tout ! Je me disais : mais pourquoi il est pas simplement en prison, allez go quoi !

En fait, ce qui m’a vraiment fait flipper c’est au moment où on m’a demandé si c’était bien cette personne. Ils l’ont fait se retourner, et malgré qu’il voyait seulement son reflet il savait très bien que j’étais derrière. Il a lancé un de ces regards de haine… Putain si le mec il va pas en taule il va vouloir me tuer et tout. J’étais flippée.

Il a été en prison… 3 ans. Je vois pas mal de trucs où y’a des personnes qui font rien de vraiment grave et ils en ont pour 5 ans. Et je me dis qu’il a en partie détruit mon innocence. Je savais même pas ce que c’était faire l’amour ou des trucs comme ça et puis là on m’a balancé « tiens dans la gueule ! ». C’était vraiment ça qui m’a mis la haine envers le monde, la loi, tout ça. Parce que pour moi c’est injuste, mais au niveau de la loi c’est juste.

Il est vite sorti. Je l’ai croisé quand j’avais 16 ans. J’étais dans ma phase rebelle où je voulais casser la gueule à tout le monde qui me faisait chier. Je l’ai vu et sur le moment j’avais une haine intérieure. Bizarrement il m’a vue et il m’a regardée, et il s’est cassé en courant. Du coup j’étais en mode « bon finalement la loi à fait son travail, ou bien la prison ! » Ça m’arrive de temps à autre de le croiser et je le regarde vraiment d’un air « je vais te défoncer un jour ! ». Mais maintenant il a quitté la Suisse, c’est déjà un bon truc.

J’ai envie de dire qu’on a tous des vécus assez différents. Comme dirait ma grand-mère « chacun a sa croix à porter ». Mais peut être que si cela ne m’était pas arrivé je serais pas la personne que je suis maintenant. Qui sait, peut être que je serais une pimbêche hyper narcissique qui n’a aucun respect envers les gens. »

(Saint-Jean)

Partie 3/5

« Quand j’étais petite je ne parlais pas. Pas du tout. Je disais seulement papa, maman, et je montrais ce que je voulais. Je faisais du mutisme sélectif. C’était un peu au moment où je commençais gentiment à m’ouvrir aux personnes qu’il y a eu ce qu’il y a eu. Je me suis complètement renfermée et j’ai repris la parole à l’âge de 10 ans. Bah en fait j’étais un peu… dans South Park y’a le petit bonhomme qui parle jamais, je sais plus comment il s’appelle… celui avec la capuche ! Il parle pas mais il fait les conneries avec eux. J’étais comme ça en fait. Je parlais pas mais je faisais les conneries !

Je riais et tout, et dès que quelqu’un se sentait triste je le réconfortais mais c’était vraiment au niveau des gestes que je communiquais. Si y’a quelqu’un qui allait pas j’allais vers elle et je lui tapotais le dos. Sinon parler c’était pas mon truc. Je kiffais pas faire des phrases, je trouvais ça inutile. Des fois je disais des trucs, bien évidemment, mais c’était vraiment que j’étais obligée de faire une phrase. C’était plutôt : « oui », « non » et « je sais pas ». Si je pouvais éviter de parler j’évitais.

Disons que j’ai des amis extrêmement extravertis et vraiment avec eux je me sentais moi-même. Je les voyais comme ça et je me suis dit : « ça a l’air ouf d’être comme ça en fait ! » Du coup petit à petit j’ai commencé à dire les choses. Dès qu’un truc me plaisait je le disais, dès qu’un truc me plaisait pas je le disais. Mais c’est un travail que j’ai fait petit à petit. J’ai pas changé d’un coup en me disant « ouais demain je serai comme ça, allez ! » Ça a commencé par des bonjours, des trucs comme ça. C’est venu comme ça, petit à petit. »

(Saint-Jean)

Partie 4/5

Malheureusement je suis tombée sur une belle-mère qui était hyper stricte. Dès que je commençais vraiment à m’ouvrir c’était « non tu fais pas la folle, une femme ça doit être comme ça ». J’avais pas le droit d’être moi-même chez moi. Je devais être calme, posée, une femme parfaite selon elle. C’est à dire qui rigole pas trop fort, qui parle pas avec toutes personnes qu’elle rencontre. Après l’école tu rentres à la maison et tu fais à manger, comme une femme. Je faisais tout ça alors que sa fille allait en boite et elle était plus jeune que moi. Je me posais la question si c’était parce que j’étais une personne assez difficile, et que si elle n’était pas comme ça avec moi je ferais plein de bêtises.

Ce qui m’a vraiment fait tilt c’est au moment où elle m’a dit que j’étais une moins que rien, que je faisais rien à la maison, des trucs comme ça. À ce moment là je me suis dit : « non c’est pas vrai, je fais tes trucs avec toi, je fais à manger, je fais le linge, tu peux pas me dire que je ne sers à rien. Bon bah si je sers à rien à quoi ça sert que je sois ici. » Du coup le soir même j’ai préparé mes affaires, mon sac, j’ai mis tous les documents qui étaient hyper importants parce que j’avais peur qu’elle jette tout, et je suis partie le lendemain matin. Je suis allée me réfugier chez mon copain.

Durant toute la journée j’étais en stress parce qu’elle est assez volcanique ma belle-mère. Et moi je voulais vraiment éviter tout ce qui était conflit. C’est à ce moment là aussi que je me suis rendu compte que j’étais vraiment fatiguée. Psychologiquement j’étais vraiment K.O., physiquement aussi. J’avais laissé une petite lettre en mettant la faute sur moi en fait ! C’est ça le truc ! Je disais que j’étais un problème financièrement, que le mieux c’était que je parte pour que financièrement ils puissent mieux s’en sortir. Alors qu’en fait je ne dépensais rien. Tous mes vêtements c’était les vêtements de ma demi-sœur et de ma belle-mère parce que ça me saoulait de faire du shopping, du coup ça m’allait très bien les secondes-mains. Mais j’ai préféré écrire un petit mot en disant que c’était ma faute. »

(Saint-Jean)

Partie 5/5

« Le point qui a vraiment changé ma vie c’est quand mon père et ma belle-mère se sont séparés, du coup je suis partie de là-bas. C’est à ce moment là que je me suis vraiment remise en question, mais tout. Je me suis rendu compte que je faisais tout pour eux et qu’il y avait aucun truc que je faisais pour moi. Je ne savais pas si les émotions que je ressentais envers les gens étaient sincères ou pas. J’avais l’impression d’être une coquille vide. Je voyais que dès qu’une personne m’aimait, je devais aimer d’office. Ce genre de trucs.

Du coup je me suis aussi posé la question si j’aimais réellement mon copain. J’ai rompu avec lui. Durant un mois je l’ai laissé de côté. Il a encore été patient. Je l’ai recontacté, on s’est reparlé, on s’est tout dit, tout ce qui allait, tout ce qui allait pas. Et puis, pour finir, je me suis rendu compte que vraiment mes sentiments étaient sincères ! On est à peu près reparti de zéro. Et en fait maintenant tout va pour le mieux ! Mon copain c’est vraiment… comment dire… c’est la meilleure chose qui me soit arrivée ! J’ai jamais vu un garçon aussi patient. Surtout que je l’ai friendzoné durant 3 ans ! Et petit à petit je me suis dit « en fait je pense que je l’aime ce mec ! ».

Là maintenant je sais vraiment quelle personnalité j’ai, ce que j’aime, ce que j’aime pas. Déjà au niveau de l’avenir je sais ce que je veux faire vraiment, alors qu’avant j’étais hyper indécise, toujours à la recherche de la perfection. En fait maintenant j’en ai rien à faire. Si je réussis tant mieux. Si je réussis pas, on recommence. Mais ouais maintenant je profite à fond de la vie ! J’ai plus de tabou maintenant. S’il faut dire les choses, je les dis et puis voilà ! J’essaie de faire en sorte…je sais pas comment dire. Les personnes trouvent que…pour eux chaque traumatisme ne doit pas être partagé ou quoi que ce soit, alors que moi je suis plutôt du sens que si y’a quelque chose qui va pas il faut le dire. Pourquoi le cacher, le refouler ? »

(Saint Jean)

Publié le: 6 octobre 2020

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