
Partie 1/2
« Aujourd’hui je suis capable d’en parler, mais dis-toi que ça a été un travail de longue haleine. Mon père je l’ai plus vu depuis longtemps parce que… ça a été un violeur. Il a violé ma petite sœur. Je l’ai vu. J’avais 6 ans et ma petite sœur en avait 2. C’est moi qui ai pu en parler à ma mère. Ça s’est passé une fois, mais c’était une fois de trop. Ma mère a dû fermer son magasin, fermer sa maison, ramener tous les meubles, et quitter La Réunion pour partir en métropole avec ses trois enfants, moi et mes deux petites sœurs sous le bras.
On a entamé les procédures pénales à Paris. Je suis resté dans les tribunaux de mes 8 à mes 17 ans. Ça a été très, très long, avec des psychologues et des juges pour enfants. Et ce qui était marrant dans cette histoire, c’est que le juge qui traitait mon dossier a été jugé pour attouchements sur mineurs 5 ans plus tard. C’est pour te montrer un petit peu la complexité de la chose. Mon père était professeur des écoles. Sauf qu’avec ce fameux juge, il a eu une autorisation de continuer son métier pendant l’instruction de justice durant plus de 5 ans. On n’a même pas eu le droit à l’éloignement du père. On a voulu nous forcer à lui rendre visite parce qu’il avait toujours son droit parental, chose pour moi qui n’était pas concevable. C’était hors de question. Si je l’avais vu, je lui aurais sauté dessus et bouffé la carotide. Ah non mais ça a été une galère !
Il devait écoper d’une peine de 4 ans ferme avec 2 ans de sursis. Il n’a rien eu au final. Il est toujours professeur des écoles. Il y a beaucoup de cas qui sont comme ça. Le monde est bourré d’injustices. Quand on connaît les bonnes personnes dans le genre d’endroit où moi j’habitais, dans les îles, on fait un petit peu ce qu’on veut. En métropole il y aurait moins eu cet impacte prégnant de ma famille. Parce que c’est une grande famille de la Réunion, et surtout une certaine branche de la famille qui est une vieille branche noble à la con. Et quand tu connais du monde, bah ça aide. Il n’y a pas de justice. Ça n’existe pas ce genre de truc. En tout cas moi je l’ai pas vue ! »
(Carouge)

Partie 2/2
« Ma sœur a eu de gros chocs post-traumatiques. Elle parlait plus avec personne, personne ne pouvait la toucher, à part ma mère. Le contact avec tout ce qui était gent masculine était impossible, à part avec moi, jusqu’à l’âge de ses 8-9 ans. Elle a toujours des petits tics. Le fait de vouloir avoir une prégnance sur tout ce qui l’entoure, avoir une emprise sur son quotidien. Mais elle arrive à l’effacer avec le temps. Et elle a trouvé un domaine d’étude qui lui convient très bien. Elle va faire du management. Donc elle va pouvoir avoir une emprise sur son domaine [rires] ! Et elle a un copain maintenant, depuis plus de 6 ans, et elle est très bien, elle peut se reconstruire. Mais ça a été long, très compliqué.
Moi, après ça, j’ai quand même eu un choc traumatique. J’étais un garçon très jovial, super sociable, et j’ai commencé à me refermer. La période la plus difficile pour moi a été la période de l’adolescence. Ça a été compliqué pour me construire sentimentalement parlant. Tu sais, les premières découvertes : la première fois que tu vas sortir avec une fille, la première fois que tu vas devoir l’embrasser, etc. Ça a été une galère ! Aussi parce que je m’en suis voulu longtemps. Je savais pertinemment que c’était pas ma faute, mais quand t’es enfant et tu vois un acte comme celui-ci, tu te dis : j’aurais pu faire quelque chose. Bien sûr, mais quoi ? C’est la grande question.
Bien souvent ça demande du temps. Le plus navrant c’est ces paroles à la con : « t’inquiète pas, ça va passer » ou « je te comprends ». Et en fait y’a une pression sociale derrière tout ça, on te voit comme une pauvre petite chose. Mais non ! Je ne suis pas une pauvre petite chose ! Je suis juste un être humain qui va devoir évoluer face à une action qui vient de se passer. Je pense qu’on a tous le pouvoir de se reconstruire face à un évènement. Si on nous le permet. Soit en nous apportant les outils, soit en nous laissant un petit peu de temps. Je suis en train d’écrire un bouquin sur la résilience. Je reprends des éléments qui sont compliqués, durs, et j’essaie de les mettre en lumière pour effacer cette dureté, et mettre en avant le positif, la reconstruction. »
(Carouge)

Partie 1/2
« Aujourd’hui je suis capable d’en parler, mais dis-toi que ça a été un travail de longue haleine. Mon père je l’ai plus vu depuis longtemps parce que… ça a été un violeur. Il a violé ma petite sœur. Je l’ai vu. J’avais 6 ans et ma petite sœur en avait 2. C’est moi qui ai pu en parler à ma mère. Ça s’est passé une fois, mais c’était une fois de trop. Ma mère a dû fermer son magasin, fermer sa maison, ramener tous les meubles, et quitter La Réunion pour partir en métropole avec ses trois enfants, moi et mes deux petites sœurs sous le bras.
On a entamé les procédures pénales à Paris. Je suis resté dans les tribunaux de mes 8 à mes 17 ans. Ça a été très, très long, avec des psychologues et des juges pour enfants. Et ce qui était marrant dans cette histoire, c’est que le juge qui traitait mon dossier a été jugé pour attouchements sur mineurs 5 ans plus tard. C’est pour te montrer un petit peu la complexité de la chose. Mon père était professeur des écoles. Sauf qu’avec ce fameux juge, il a eu une autorisation de continuer son métier pendant l’instruction de justice durant plus de 5 ans. On n’a même pas eu le droit à l’éloignement du père. On a voulu nous forcer à lui rendre visite parce qu’il avait toujours son droit parental, chose pour moi qui n’était pas concevable. C’était hors de question. Si je l’avais vu, je lui aurais sauté dessus et bouffé la carotide. Ah non mais ça a été une galère !
Il devait écoper d’une peine de 4 ans ferme avec 2 ans de sursis. Il n’a rien eu au final. Il est toujours professeur des écoles. Il y a beaucoup de cas qui sont comme ça. Le monde est bourré d’injustices. Quand on connaît les bonnes personnes dans le genre d’endroit où moi j’habitais, dans les îles, on fait un petit peu ce qu’on veut. En métropole il y aurait moins eu cet impacte prégnant de ma famille. Parce que c’est une grande famille de la Réunion, et surtout une certaine branche de la famille qui est une vieille branche noble à la con. Et quand tu connais du monde, bah ça aide. Il n’y a pas de justice. Ça n’existe pas ce genre de truc. En tout cas moi je l’ai pas vue ! »
(Carouge)

Partie 2/2
« Ma sœur a eu de gros chocs post-traumatiques. Elle parlait plus avec personne, personne ne pouvait la toucher, à part ma mère. Le contact avec tout ce qui était gent masculine était impossible, à part avec moi, jusqu’à l’âge de ses 8-9 ans. Elle a toujours des petits tics. Le fait de vouloir avoir une prégnance sur tout ce qui l’entoure, avoir une emprise sur son quotidien. Mais elle arrive à l’effacer avec le temps. Et elle a trouvé un domaine d’étude qui lui convient très bien. Elle va faire du management. Donc elle va pouvoir avoir une emprise sur son domaine [rires] ! Et elle a un copain maintenant, depuis plus de 6 ans, et elle est très bien, elle peut se reconstruire. Mais ça a été long, très compliqué.
Moi, après ça, j’ai quand même eu un choc traumatique. J’étais un garçon très jovial, super sociable, et j’ai commencé à me refermer. La période la plus difficile pour moi a été la période de l’adolescence. Ça a été compliqué pour me construire sentimentalement parlant. Tu sais, les premières découvertes : la première fois que tu vas sortir avec une fille, la première fois que tu vas devoir l’embrasser, etc. Ça a été une galère ! Aussi parce que je m’en suis voulu longtemps. Je savais pertinemment que c’était pas ma faute, mais quand t’es enfant et tu vois un acte comme celui-ci, tu te dis : j’aurais pu faire quelque chose. Bien sûr, mais quoi ? C’est la grande question.
Bien souvent ça demande du temps. Le plus navrant c’est ces paroles à la con : « t’inquiète pas, ça va passer » ou « je te comprends ». Et en fait y’a une pression sociale derrière tout ça, on te voit comme une pauvre petite chose. Mais non ! Je ne suis pas une pauvre petite chose ! Je suis juste un être humain qui va devoir évoluer face à une action qui vient de se passer. Je pense qu’on a tous le pouvoir de se reconstruire face à un évènement. Si on nous le permet. Soit en nous apportant les outils, soit en nous laissant un petit peu de temps. Je suis en train d’écrire un bouquin sur la résilience. Je reprends des éléments qui sont compliqués, durs, et j’essaie de les mettre en lumière pour effacer cette dureté, et mettre en avant le positif, la reconstruction. »
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« Aujourd’hui je suis capable d’en parler, mais dis-toi que ça a été un travail de longue haleine. Mon père je l’ai plus vu depuis longtemps parce que… ça a été un violeur. Il a violé ma petite sœur. Je l’ai vu. J’avais 6 ans et ma petite sœur en avait 2. C’est moi qui ai pu en parler à ma mère. Ça s’est passé une fois, mais c’était une fois de trop. Ma mère a dû fermer son magasin, fermer sa maison, ramener tous les meubles, et quitter La Réunion pour partir en métropole avec ses trois enfants, moi et mes deux petites sœurs sous le bras.
On a entamé les procédures pénales à Paris. Je suis resté dans les tribunaux de mes 8 à mes 17 ans. Ça a été très, très long, avec des psychologues et des juges pour enfants. Et ce qui était marrant dans cette histoire, c’est que le juge qui traitait mon dossier a été jugé pour attouchements sur mineurs 5 ans plus tard. C’est pour te montrer un petit peu la complexité de la chose. Mon père était professeur des écoles. Sauf qu’avec ce fameux juge, il a eu une autorisation de continuer son métier pendant l’instruction de justice durant plus de 5 ans. On n’a même pas eu le droit à l’éloignement du père. On a voulu nous forcer à lui rendre visite parce qu’il avait toujours son droit parental, chose pour moi qui n’était pas concevable. C’était hors de question. Si je l’avais vu, je lui aurais sauté dessus et bouffé la carotide. Ah non mais ça a été une galère !
Il devait écoper d’une peine de 4 ans ferme avec 2 ans de sursis. Il n’a rien eu au final. Il est toujours professeur des écoles. Il y a beaucoup de cas qui sont comme ça. Le monde est bourré d’injustices. Quand on connaît les bonnes personnes dans le genre d’endroit où moi j’habitais, dans les îles, on fait un petit peu ce qu’on veut. En métropole il y aurait moins eu cet impacte prégnant de ma famille. Parce que c’est une grande famille de la Réunion, et surtout une certaine branche de la famille qui est une vieille branche noble à la con. Et quand tu connais du monde, bah ça aide. Il n’y a pas de justice. Ça n’existe pas ce genre de truc. En tout cas moi je l’ai pas vue ! »
(Carouge)

Partie 2/2
« Ma sœur a eu de gros chocs post-traumatiques. Elle parlait plus avec personne, personne ne pouvait la toucher, à part ma mère. Le contact avec tout ce qui était gent masculine était impossible, à part avec moi, jusqu’à l’âge de ses 8-9 ans. Elle a toujours des petits tics. Le fait de vouloir avoir une prégnance sur tout ce qui l’entoure, avoir une emprise sur son quotidien. Mais elle arrive à l’effacer avec le temps. Et elle a trouvé un domaine d’étude qui lui convient très bien. Elle va faire du management. Donc elle va pouvoir avoir une emprise sur son domaine [rires] ! Et elle a un copain maintenant, depuis plus de 6 ans, et elle est très bien, elle peut se reconstruire. Mais ça a été long, très compliqué.
Moi, après ça, j’ai quand même eu un choc traumatique. J’étais un garçon très jovial, super sociable, et j’ai commencé à me refermer. La période la plus difficile pour moi a été la période de l’adolescence. Ça a été compliqué pour me construire sentimentalement parlant. Tu sais, les premières découvertes : la première fois que tu vas sortir avec une fille, la première fois que tu vas devoir l’embrasser, etc. Ça a été une galère ! Aussi parce que je m’en suis voulu longtemps. Je savais pertinemment que c’était pas ma faute, mais quand t’es enfant et tu vois un acte comme celui-ci, tu te dis : j’aurais pu faire quelque chose. Bien sûr, mais quoi ? C’est la grande question.
Bien souvent ça demande du temps. Le plus navrant c’est ces paroles à la con : « t’inquiète pas, ça va passer » ou « je te comprends ». Et en fait y’a une pression sociale derrière tout ça, on te voit comme une pauvre petite chose. Mais non ! Je ne suis pas une pauvre petite chose ! Je suis juste un être humain qui va devoir évoluer face à une action qui vient de se passer. Je pense qu’on a tous le pouvoir de se reconstruire face à un évènement. Si on nous le permet. Soit en nous apportant les outils, soit en nous laissant un petit peu de temps. Je suis en train d’écrire un bouquin sur la résilience. Je reprends des éléments qui sont compliqués, durs, et j’essaie de les mettre en lumière pour effacer cette dureté, et mettre en avant le positif, la reconstruction. »
(Carouge)

Partie 1/2
« Aujourd’hui je suis capable d’en parler, mais dis-toi que ça a été un travail de longue haleine. Mon père je l’ai plus vu depuis longtemps parce que… ça a été un violeur. Il a violé ma petite sœur. Je l’ai vu. J’avais 6 ans et ma petite sœur en avait 2. C’est moi qui ai pu en parler à ma mère. Ça s’est passé une fois, mais c’était une fois de trop. Ma mère a dû fermer son magasin, fermer sa maison, ramener tous les meubles, et quitter La Réunion pour partir en métropole avec ses trois enfants, moi et mes deux petites sœurs sous le bras.
On a entamé les procédures pénales à Paris. Je suis resté dans les tribunaux de mes 8 à mes 17 ans. Ça a été très, très long, avec des psychologues et des juges pour enfants. Et ce qui était marrant dans cette histoire, c’est que le juge qui traitait mon dossier a été jugé pour attouchements sur mineurs 5 ans plus tard. C’est pour te montrer un petit peu la complexité de la chose. Mon père était professeur des écoles. Sauf qu’avec ce fameux juge, il a eu une autorisation de continuer son métier pendant l’instruction de justice durant plus de 5 ans. On n’a même pas eu le droit à l’éloignement du père. On a voulu nous forcer à lui rendre visite parce qu’il avait toujours son droit parental, chose pour moi qui n’était pas concevable. C’était hors de question. Si je l’avais vu, je lui aurais sauté dessus et bouffé la carotide. Ah non mais ça a été une galère !
Il devait écoper d’une peine de 4 ans ferme avec 2 ans de sursis. Il n’a rien eu au final. Il est toujours professeur des écoles. Il y a beaucoup de cas qui sont comme ça. Le monde est bourré d’injustices. Quand on connaît les bonnes personnes dans le genre d’endroit où moi j’habitais, dans les îles, on fait un petit peu ce qu’on veut. En métropole il y aurait moins eu cet impacte prégnant de ma famille. Parce que c’est une grande famille de la Réunion, et surtout une certaine branche de la famille qui est une vieille branche noble à la con. Et quand tu connais du monde, bah ça aide. Il n’y a pas de justice. Ça n’existe pas ce genre de truc. En tout cas moi je l’ai pas vue ! »
(Carouge)

Partie 2/2
« Ma sœur a eu de gros chocs post-traumatiques. Elle parlait plus avec personne, personne ne pouvait la toucher, à part ma mère. Le contact avec tout ce qui était gent masculine était impossible, à part avec moi, jusqu’à l’âge de ses 8-9 ans. Elle a toujours des petits tics. Le fait de vouloir avoir une prégnance sur tout ce qui l’entoure, avoir une emprise sur son quotidien. Mais elle arrive à l’effacer avec le temps. Et elle a trouvé un domaine d’étude qui lui convient très bien. Elle va faire du management. Donc elle va pouvoir avoir une emprise sur son domaine [rires] ! Et elle a un copain maintenant, depuis plus de 6 ans, et elle est très bien, elle peut se reconstruire. Mais ça a été long, très compliqué.
Moi, après ça, j’ai quand même eu un choc traumatique. J’étais un garçon très jovial, super sociable, et j’ai commencé à me refermer. La période la plus difficile pour moi a été la période de l’adolescence. Ça a été compliqué pour me construire sentimentalement parlant. Tu sais, les premières découvertes : la première fois que tu vas sortir avec une fille, la première fois que tu vas devoir l’embrasser, etc. Ça a été une galère ! Aussi parce que je m’en suis voulu longtemps. Je savais pertinemment que c’était pas ma faute, mais quand t’es enfant et tu vois un acte comme celui-ci, tu te dis : j’aurais pu faire quelque chose. Bien sûr, mais quoi ? C’est la grande question.
Bien souvent ça demande du temps. Le plus navrant c’est ces paroles à la con : « t’inquiète pas, ça va passer » ou « je te comprends ». Et en fait y’a une pression sociale derrière tout ça, on te voit comme une pauvre petite chose. Mais non ! Je ne suis pas une pauvre petite chose ! Je suis juste un être humain qui va devoir évoluer face à une action qui vient de se passer. Je pense qu’on a tous le pouvoir de se reconstruire face à un évènement. Si on nous le permet. Soit en nous apportant les outils, soit en nous laissant un petit peu de temps. Je suis en train d’écrire un bouquin sur la résilience. Je reprends des éléments qui sont compliqués, durs, et j’essaie de les mettre en lumière pour effacer cette dureté, et mettre en avant le positif, la reconstruction. »
(Carouge)