« Comme moi je venais d’une famille où personne buvait, au début je pensais : « Ah c’est les Romands ! Le weekend ils picolent, c’est sympa ». Après il a commencé à boire la semaine, puis dès le matin parce qu’il tremblait. Il arrivait à aller au travail de 7h à 11h, puis il commençait l’apéro et il rentrait à 15h complètement soûl. Il dormait, et il ressortait le soir pour boire. Au bistrot il avait les copains, ils le trouvaient formidable et tout. Il avait besoin qu’on l’admire un peu. Et nous à la maison on l’engueulait quelquefois, alors ça le rendait triste, il se sentait exclu. C’est tout un cercle vicieux. Les enfants s’ils le rencontraient dans la rue quand il était soûl et qu’ils étaient avec des copains, ils avaient honte, ils changeaient de trottoir…
Mais au fond c’était un type formidable, très gentil, très sensible. Et disons, il avait honte aussi, il savait qu’il nous faisait mal. Moi je me sentais coupable car j’arrivais pas à l’aider et aussi je voulais protéger mes enfants. Mais lui me disait souvent : « Faut pas croire que c’est de ta faute ». On me disait de le quitter, mais je pouvais pas. C’était le père de mes enfants, les enfants l’aimaient et lui les adorait. Et il est arrivé à arrêter de boire pendant 8 ans avec les Alcooliques Anonymes. Pendant ces années il a fait sophrologue, naturopathe, plein de trucs. C’était super, il s’est réveillé quoi. Il avait un petit cabinet, et pendant 3 années ça marchait super bien. Et puis il est retombé dans l’alcool.
Il a fini par trouver une copine. Au fond ça m’a soulagée parce que c’est elle qui a pris le relais. J’étais contente qu’elle s’occupe de lui. À la fin il a été obligé d’arrêter de boire mais son foie était déjà abîmé, et il est mort d’une cirrhose à 66 ans. Mais je suis restée quand même très positive dans la vie ! Je crois que je suis née sous une bonne étoile, et puis j’ai eu une enfance heureuse dans une famille très simple en Argovie. Maintenant, je vais profiter de ma retraite. Une fois, j’ai été faire une randonnée avec un âne dans le sud de la France. L’âne marchait plus lentement que moi, et j’ai écrit dans mon carnet : « j’apprends à aimer la lenteur du temps ». »
(Plainpalais, Uni Mail)
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« Comme moi je venais d’une famille où personne buvait, au début je pensais : « Ah c’est les Romands ! Le weekend ils picolent, c’est sympa ». Après il a commencé à boire la semaine, puis dès le matin parce qu’il tremblait. Il arrivait à aller au travail de 7h à 11h, puis il commençait l’apéro et il rentrait à 15h complètement soûl. Il dormait, et il ressortait le soir pour boire. Au bistrot il avait les copains, ils le trouvaient formidable et tout. Il avait besoin qu’on l’admire un peu. Et nous à la maison on l’engueulait quelquefois, alors ça le rendait triste, il se sentait exclu. C’est tout un cercle vicieux. Les enfants s’ils le rencontraient dans la rue quand il était soûl et qu’ils étaient avec des copains, ils avaient honte, ils changeaient de trottoir…
Mais au fond c’était un type formidable, très gentil, très sensible. Et disons, il avait honte aussi, il savait qu’il nous faisait mal. Moi je me sentais coupable car j’arrivais pas à l’aider et aussi je voulais protéger mes enfants. Mais lui me disait souvent : « Faut pas croire que c’est de ta faute ». On me disait de le quitter, mais je pouvais pas. C’était le père de mes enfants, les enfants l’aimaient et lui les adorait. Et il est arrivé à arrêter de boire pendant 8 ans avec les Alcooliques Anonymes. Pendant ces années il a fait sophrologue, naturopathe, plein de trucs. C’était super, il s’est réveillé quoi. Il avait un petit cabinet, et pendant 3 années ça marchait super bien. Et puis il est retombé dans l’alcool.
Il a fini par trouver une copine. Au fond ça m’a soulagée parce que c’est elle qui a pris le relais. J’étais contente qu’elle s’occupe de lui. À la fin il a été obligé d’arrêter de boire mais son foie était déjà abîmé, et il est mort d’une cirrhose à 66 ans. Mais je suis restée quand même très positive dans la vie ! Je crois que je suis née sous une bonne étoile, et puis j’ai eu une enfance heureuse dans une famille très simple en Argovie. Maintenant, je vais profiter de ma retraite. Une fois, j’ai été faire une randonnée avec un âne dans le sud de la France. L’âne marchait plus lentement que moi, et j’ai écrit dans mon carnet : « j’apprends à aimer la lenteur du temps ». »
(Plainpalais, Uni Mail)